Depuis les classes primaires, j’ai été dans des écoles où le leadership féminin était mis en avant et en plus j’étais toujours l’une des premières à me présenter pour être déléguée. J’ai aussi une mère qui très tôt, nous a mis en garde, ma soeur et moi, sur le fait que nous ne devions jamais accepter d’être touchées ou traitées n’importe comment par des hommes et si un jour, nous y étions forcées, nous ne devions pas hésiter à le dénoncer. Elle nous forçait à lire le plus possible et nous faisais faire le plus d’activités possibles même certaines qui étaient considérées comme masculines.J’ai eu une grand-mère maternelle qui,très tôt, a été veuve mais s’est battu ‘comme un homme’ (expression que je ne loue pas mais comme le disent certains personnes l’ayant connue) pour se construire et pour permettre à tous ses enfants de grandir dans les meilleures conditions possibles et aller le plus loin dans les études.

Mon père et ma mère m’ont toujours poussé à aller le plus loin possible dans les études et n’ont jamais mentionné  de « quand est ce que tu te maries »? « Quand est ce que tu fais des enfants? ». Je crois que leur plus grand soucis est que je sois une femme intellectuellement et matériellement accomplie.

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Forte de tout ceci, j’ai été après le lycée très active dans toutes sortes d’associations et de mouvements féminins et/ou féministes dans divers endroits du monde. Et puis aujourd’hui, je suis un peu épuisée. J’ai un peu honte de dire que je suis épuisée quand je pense au travail colossal que font ces associations qui défendent les femmes victimes de violences de toutes sortes, ces femmes qui se battent pour que toutes les femmes aient accès à l’éducation, aux soins de santé, à la dignité humaine… tout ceci au prix de leurs vies.

 

 

 

awid

Je suis abonnée à la newsletter de cette organisation afin d’être au courant des actions en faveur des droits des femmes même les plus petites et dans les endroits les plus reculées du monde. En effet, de nombreuses femmes y laissent leur santé, leur vie. https://www.awid.org/

 

Cependant, je constate que le féminisme est devenu un truc cool à arborer sur un T-shirt ou à exposer sur les réseaux sociaux. La plupart des femmes et celles qui se disent féministes ne prennent en compte que leur réalité de femmes de classe moyenne à aisée et/ou de culture occidentale, athée ou peu religieuse, intellectuelle. Et ces femmes là sont celles dont la voix est la plus entendue. Mais quand elle est entendue, elle ne dénonce que leur réalité: Pourquoi met-on toujours du rose dans le rayon fille? Le droit à se laisser pousser les poils aux aisselles, aux jambes, l’égalité de salaires homme/femme en général « cadre »…Notez bien que je ne suis pas en train de tourner ces actions féministes en dérision car ce sont des questions fondées et qui oppressent les femmes de façon alarmante mais qui ne sont pas inclusives.

cool feminism

Au quotidien, que faisons nous, nous qui nous disons féministes? Que faisons-nous pour rendre la vie des autres femmes un peu plus aisée. Combien d’entre nous se sont penchées sur le cas de nos femmes de ménage à la maison, pour ne serait-ce que les aider à apprendre à lire et à écrire quand cela est nécessaire, savoir dans quelles conditions elles vivent… Au travail, quand on prend la peine de leur dire bonjour, on ne veut même pas savoir leur nom. Et honnêtement, on se fiche un peu de comment elles sont traitées ou comment est-ce qu’elles sont payées pourvu que tout soit propre.

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Dans le monde du travail, combien de femmes hiérarchiquement supérieures  se sont érigées en mentors pour d’autres plutôt que de les ignorer ou bien leur faire comprendre qu’elles ne sont que des subalternes et des machines à produire.De plus, la plupart des employés RH sont des femmes et que font-elles réellement pour aider les femmes dans leur carrière en cas de besoin de réorientation, de harcèlement moral ou sexuel et autres mauvais traitements…à part organiser des événements et conférences #GirlPower bien documentées dans les médias.

Aujourd’hui, avons-nous réellement aidé au moins une femme dans nos vies sans qu’elle ne soit notre amie, de notre famille, sans rien attendre en retour, par un conseil, un compliment, une action en sa faveur?

Girl Power

Dans les associations, on aime avoir le plus de militantes possibles mais avons-nous compris que la femmes de minorités raciales, la femme de classe moins aisée voire démunie, la femme religieuse…ont des réalités qui doivent être acceptées, mises en lumière et prises en compte dans la lutte pour les droits des femmes: L’hypersexualisation de certains types de femmes, les écarts de salaires et traitements entre les femmes cadres et les femmes employées ou agents de maîtrise ou les femmes d’autres origines, le rejet des réalités religieuses de celles « croyantes »…  Quand Donald Trump tient des propos misogynes au Etats-Unis, on organise une marche mondiale des femmes avec des bonnets roses parce la femme américaine, blanche, de classe moyenne à aisée, peu voire pas religieuse n’est pas contente. Mais quand est ce que l’on aura un telle mobilisation pour les femmes violées et détruites au Congo? Pourquoi n’avons nous pas eu de si grandes marches pour les femmes qui ne peuvent ni conduire ni se déplacer sans l’autorisation d’un homme à la maison dans certains endroits du monde? Pourquoi n’avons nous pas eu de telles marches pour toutes les femmes qui du fait de leurs situations sociales précaires sont victimes de toutes sortes d’abus? Pourquoi n’avons nous pas eu une telle marche pour dénoncer toutes les femmes qui sont tuées sous les coups de leurs conjoints? La réponse est peut-être que ce féminisme là n’est pas assez occidentale, de classe moyenne à aisée, élitiste, est trop religieux voire pas assez athée donc il n’intéresse pas? Ou autre chose peut-être que les femmes non occidentales ou religieuses ne font pas assez d’actions, ne montrent pas assez d’engagement pour mettre en lumière leurs féminismes, leur besoin d’avoir les mêmes droits fondamentaux que les hommes, notamment celles qui arrivent à être socialement mieux loties dans ces divers groupes?

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Crédit Photo: AFP

Et puis, ces femmes qui critiquent les tenues et l’apparence physique des autres femmes. Si vous vous aimez minces, certaines se préfèrent rondes. Si vous préférez des vêtements qui vous couvrent tout le corps et/ou amples, d’autres les préfèrent plus courts et/ou près du corps. Je me rappelle encore , que lors d’un de mes premiers stages d’étude, une des responsables avait lancé en parlant d’une stagiaire en mini-jupe: « Après elles vont s’étonner qu’on se frotte à elles dans le métro ». Certains femmes de certains milieux vont trouver que les autres se maquillent vulgairement et puis d’autres groupes vont trouver que les autres s’habillent trop « Sainte Ni touche ». N’a t-on pas de choses plus importantes à défendre?

Cela va sans dire que certains lieux de culte ou corps de métiers exigeront une certaine apparence physique comme par exemple les métiers de la finance souhaiteront que hommes et femmes soient vêtus de façon très formelle.

J’ai donc décidé de me calmer un peu avec les messages féministes à la mode mais mettre beaucoup plus d’énergie sur les actions que je mène à mon niveau au quotidien pour apporter un peu plus dans la vie des autres femmes autour de moi autant que faire se peut. Les posts sur les réseaux sociaux sont beaux et de plus en plus nombreux mais sur le terrain et au quotidien, nous sommes peu nombreuses à pratiquer ce féminisme #Girlpower, #Sisterhood, #WeShouldAllBeFeminists en prenant en compte toutes les femmes dans toutes leurs différences…

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C’est pour toutes ces raisons que mon féminisme militant avec beaucoup de bruit mais sans fond est fermé pour travaux et rouvrira pour être un féminisme d’action, inter-sectionnel et quotidien.

Avec Amour, Joie et Détermination

Aurore

 

  1. Merci pour ton article qui en plus de nous faire réfléchir me fait découvrir ton blog… Le féminisme blanc et libéral est parfois un fléau, et je plaide évidemment coupable de ce côté, j’ai mis longtemps à prendre conscience de ces réalités

    • TheColouredWaltz says:

      Merci chère Irène pour tes mots et pour ta compréhension. Par ailleurs, Je discutais,ce week-end avec une amie africaine, qui suggérait aussi que les féministes africaines soient plus engagées par des actions plus parlantes donc je me dis que les efforts devraient en effet, être faits de tous les côtés.

  2. <3
    Je pense aussi qu'il y a beaucoup de paroles et de mouvements très médiatisés mais très peu d'actions réelles au quotidien de la part des féministes.
    Je suis la même démarche depuis un moment, l'intersectionnalité est un beau concept où je me retrouvais déjà avant de découvrir sa vraie définition.
    Par contre, j'ai envie de réagir sur une toute petite partie, celle concernant le maquillage, qui je sais n'est pas l'idée principale de ton article, mais je peux m'en empêcher.
    Perso, j'encourage à oublier le make-up oui, spécifiquement ces personnes qui le portent pour les autres, qui n'assument pas leurs imperfections et sont proches de l'aliénation… Cela me permet d'exprimer davantage ma féminité mais rien d'autre. Il y a des jours où j'en mets, d'autres non, j'affiche fièrement mes imperfections. Imperfection is beauty. Pour d'autres, c'est par intérêt artistique ou autre mais celles et ceux qui le font juste parce qu'ils/elles n'assument pas leut tête au naturel, je trouve cela dommage. Après chacun.e est libre, heureusement.

    J'adore ton article et t'encourage à continuer. D'ailleurs où en es tu à présent ?

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